lundi 17 novembre 2008

LES EN-DESSOUS DE LA GUERRE À L’EST DE LA RD CONGO

C’est avec grand intérêt que tout le monde suit la guerre à l’Est de la République Démocratique du Congo. Certains font des réactions à France24. Le danger de ces commentaires émotionnels est de transformer France24 en la fameuse radio des milles et une collines, de triste mémoire, qui a accentué la haine entre hutu et tutsi et déclencher le génocide de 1994.

Loin de tomber dans ce piège, j’ai préféré vous offrir un autre son de cloche, en reprenant l’analyse Gaspard Musabyimana, un journaliste d’origine burundaise, sur les vraies causes de la guerre à l’Est du Congo.

Une chose est vraie, militairement parlant quand on dit que l’ennemi est à 10 Km, ce qu’il s’est déjà infiltré dans l’agglomération. Ce qui revient à dire, Goma et Kanyabayonga sont tombés depuis longtemps entre les mains des rebelles. Il ne reste plus que la concrétisation, quand, la MONUC, impuissante, se retirera officiellement de la RDC. Tout ce ballet diplomatique ne sert qu’à nous distraire. Le Congo a déjà perdue sa partie Est et sa balkanisation vient de commencer. Suivront les provinces orientales et le Katanga. Après le Congo c’est l’Angola et le Nigeria qui sont visés par les puissances anglo-saxons. Pauvre Olusegun Obasanjo, il ne sait pas que c’est la même formule qui sera appliquée à son pays. Qui vivra verra.

Les en-dessous de la guerre à l’Est de la RD Congo

Les raisons de la guerre à l’Est de la République Démocratique du Congo ne sont pas celles que veulent faire avaler au public certains médias tombés dans la propagande bien huilée du tandem Nkunda-Kagame et de leurs sponsors.

Une guerre juste n’existe pas

C’est connu, les fauteurs de troubles investissent beaucoup dans les médias pour justifier leurs actions. Mais justifier une guerre, c’est justifier l’injustifiable. La guerre tue, sème la désolation, crée des famines, des rancœurs,... Même les vainqueurs n’en sortent pas indemnes. L’histoire récente est là pour nous le montrer.

Parce que la guerre a des conséquences néfastes, il faut une manipulation de l’opinion publique pour lui faire accepter les "raisons fondées" de la guerre. D ’où on ne peut que recourir aux mensonges. Ceux-ci peuvent être découverts plus tard mais cela ne change pas le plan arrêté. Ainsi par exemple et comme le souligne le Colonel Jaques Hogard (Cahiers du CESAT n° 13 Septembre 2008) « le charnier de Timisoara était bien une morgue mais Ceausescu a bien été renversé »; « les armes de destruction massives dénoncées par le Pentagone et prétextes de l'intervention alliée en Irak n'existaient pas mais Saddam Hussein a bien été renversé »; « les 100.000 morts albanais au Kosovo n'étaient en réalité «que» moins de 4.000 mais la Serbie a bien été chassée de sa province septentrionale ».

Dans le cas de la guerre à l’Est de la RDC, le prétexte a été trouvé : la présence des "génocidaires" dans les forêts congolaises. Pour rappel, en juillet 1994, des milliers de réfugiés Hutu, fuyant l’avancée des hommes de Paul Kagame, ont traversé la frontière pour se réfugier en RDC. L’armée du FPR les y a poursuivis et a bombardé leurs camps à l’arme lourde entre 1996 et 1997, ensuite dans une deuxième attaque en 1998. Les hommes de Paul Kagame poursuivront les fuyards jusqu’à Tingi Tingi et à Mbandaka, voire dans les marécages de Ndjoundou et de Loukolela au Congo Brazzaville. Les rescapés de cette boucherie humaine (plus de 200.000 victimes !) se sont terrés dans des forêts denses du Congo où ils vivent depuis 14 ans. Que peuvent faire ces pauvres dans leur survie ? Où peuvent-ils trouver des moyens matériels et humains pour attaquer un pays comme le Rwanda, première puissance militaire de la région ? Quelle action ont-ils entreprise depuis ces nombreuses années et qui puisse justifier les attaques de Nkunda sur la population congolaise ? Pourtant, il ne manque pas de médias et de spécialistes de la région des Grands Lacs pour reprendre les discours propagandistes avancés par Laurent Nkunda et son mentor Paul Kagame.

L’histoire se répète

Le général Nkunda, qui dirige la rébellion au Kivu, est un militaire du FPR. Il faisait partie de son armée en 1994 au Rwanda. Le voilà envoyé au Kivu pour jeter des milliers de Congolais sur la route où ils meurent de faim et de froid. Exactement comme au Rwanda. En octobre 1990, Paul Kagame était un officier de l’armée ougandaise. Museveni lui donna des armes pour attaquer le Rwanda. Comme au Rwanda où il y avait la MINUAR, au Congo, il y a la MONUC. Elle assiste en spectatrice aux bombardements des camps de populations déplacés et à leur fuite devant l’avancée des hommes de Nkunda. Comme au Rwanda entre 1990 et1994, des ballets diplomatiques se croisent pour trouver une solution à la fin de la guerre au Kivu. Pourtant, ces émissaires internationaux connaissent tous l’issue de cette guerre : comme au Rwanda où le résultat attendu était la prise du pouvoir par le FPR, en RDC l’objectif final est l’annexion de deux régions du Kivu par le Rwanda.

Une guerre pour étendre l’espace

Le Rwanda est comme sous-tutelle des pays anglo-saxons, les Etats-Unis d’Amérique en tête. Le fait que l’ex-premier ministre britannique, Tony Blair, a pris du service chez Paul Kagame comme Conseiller ou que les Etats-Unis ont signé avec le Rwanda des accords de protection mutuelle contre la justice internationale, n’est qu’une partie visible d’un iceberg. Les Etats-Unis sont allés plus loin. Le Pentagone compte sur le Rwanda dans sa stratégie militaire. Les militaires rwandais roulent entre autres pour cette grande puissance au Darfour. D’autres projets militaires américains de grande envergure sont en cours pour le remodelage de la région des Grands Lacs africains, à partir du Rwanda.

Côté privé, les lobbies américains ont drainé au Rwanda de grands milliardaires qui ont été séduits notamment par la beauté du climat de ce pays. Des stars de Hollywood et autres célébrités américaines se bousculent aux portes du Rwanda. Bill Clinton, l’ex-président américain ou Bill Gates du géant Microsoft, ne sont pas en reste. Mais le Rwanda qu’ils ont choisi souffre de sa petitesse. Les Américains, habitués aux grands espaces, y étouffent. D’où il faut étendre le pays en annexant l’Est de la RDC au Rwanda.

Main basse sur des minerais rares

La guerre au Kivu, avec ses lots de malheurs, n’en émeuvent pas tellement les grandes puissances. Le déplacement des populations ne peut que les arranger dans leurs desseins. Le raisonnement est le suivant : le Kivu regorge de matières premières dont ont besoin ces puissances pour leurs industries de pointe. Mais il est densément habité, de façon qu’il est difficile, dans certaines régions, d’accéder au sous-sol sur de larges étendues. Exproprier la population coûterait cher. D’où il faut l’éloigner par tous les moyens y compris par la guerre.

Selon cette logique, les déplacés n’auront pas de problèmes car la RDC a des terres encore inhabitées et des forêts à défricher. Si elles veulent échapper à la misère, ces populations n’ont qu’à aller habiter ailleurs, loin des canons qui tonnent. Elles vont à la longue s’acclimater à cette nouvelle vie. Des étendues vides seront ainsi disponibles pour une exploitation à large échelle des minerais rares dont le coltan.

Joseph Kabila n’a pas la cote

Pour avoir notamment signé des contrats juteux avec des sociétés chinoises, Joseph Kabila, le Président de la RDC, n’a pas la cote en Occident. Il y est même vu d’un mauvais œil. Il aura de la peine à se tirer indemne de la guerre à l’Est de son pays. A défaut de l’éloigner, ce sera une occasion pour le mettre à genoux et lui imposer que les provinces du grand Congo démocratique soient des entités autonomes. Le Kivu sera ainsi sous influence rwandaise et l’extension de l’Eldorado légalement réalisée.

Kagame est le maillon central dans la réalisation de ce projet. D’où ces puissances tiennent tellement à lui de sorte qu’il peut faire ce qu’il veut en lançant entre autres régulièrement sa férule sur le Congo voisin. L’on se souviendra que ses hommes de paille Laurent Nkunda et Jules Mutebusi ont mis à feu et à sang les deux villes du Kivu, Goma et Bukavu. Impunément. Ils ont traversé la frontière, avec leurs butins, pour se réfugier au Rwanda. Laurent Nkunda est revenu en force. A la tête des bataillons entiers lui fournis par Paul Kagame, il a conquis un grand territoire, il a un hymne national et un drapeau. Il tue et pille, chasse les populations congolaises de leurs biens. Impunément.